Suite à la publication de mon billet Le R.O.I. de l’intelligence collective enfin démontré ?, Roberta Faulhaber, Visual Practitioner, m’a envoyé un article très intéressant.
Depuis fort longtemps, on mesure le quotient intellectuel des individus. Pourquoi ne pas mesurer l’intelligence collective d’un groupe ?
C’est l’objet d’une étude publiée en 2010 par l’American Association for the Advancement of Science suite aux travaux d’un groupe de scientifiques réuni à l’initiative du MIT Center for Collective Intelligence (le célèbre Massachusetts Institute of Technology !) :
Evidence for a Collective Intelligence Factor in the Performance of Human Groups
Introduction de l’article :
Psychologists have repeatedly shown that a single statistical factor—often called “general intelligence”—emerges from the correlations among people’s performance on awide variety of cognitive tasks. But no one has systematically examined whether a similar kind of “collective intelligence” exists for groups of people. In two studies with 699 people, working in groups of two to five, we find converging evidence of a general collective intelligence factor that explains a group’s performance on a wide variety of tasks. This “c factor” is not strongly correlated with the average or maximum individual intelligence of group members but is correlated with the average social sensitivity of group members, the equality in distribution of conversational turn-taking, and the proportion of females in the group.
L’étude montre que le “succès” du groupe est complètement corrélé à la capacité des membres du groupe à s’écouter, se respecter et se sentir reconnu. Par ailleurs, il est démontré que les capacités cognitives des membres ne prédisent pas les capacités cognitives du groupe.
L’approche méthodologique : To guide our task sampling, we drew tasks from all quadrants of the McGrath Task Circumplex (6, 12), a well established taxonomy of group tasks based on the coordination processes they require. Tasks included solving visual puzzles, brainstorming, making collective moral judgments, and negotiating over limited resources. At the beginning of each session, we measured team members’ individual intelligence. And, as a criterion task at the end of each session, each group played checkers against a standardized computer opponent.
Quatre facteurs permettent d’expliquer le succès du groupe dans les tâches données :
- La “sensibilité sociale” mesuré par le test “Reading the Mind in the Eyes”
- L’égalité du temps de parole : la capacité à intervenir « chacun à son tour » – conversational turn-taking
- La distribution équitable de ces 2 facteurs dans le groupe
- Le nombre de femmes dans le groupe … parce que les femmes dans la culture américaine sont plus aptes à gérer la sensibilité sociale (cf. premier point).
Alors, peut-on mesurer l’intelligence collective d’un groupe ? Quelle fiabilité, précision, pertinence ? A mon avis autant que la mesure de l’intelligence individuelle, c’est-à-dire une précision toute relative !
Par ailleurs, il y a plusieurs formes d’intelligences (cf. http://fr.wikipedia.org/wiki/Th%C3%A9orie_des_intelligences_multiples)… et pour l’intelligence collective ?
Cela dit, cette étude montre qu’on PEUT mesurer l’intelligence collective d’un groupe d’une manière scientifique (avec bien sûr le même degré de précision que pour le QI individuel).
J’espère que cette étude coupera un peu dans leur élan ceux qui affirment encore aujourd’hui que l’intelligence collective n’existe pas. Cependant, si elle existe à l’état naturel dans notre vie sociale, il est clair qu’elle a besoin d’aide pour exister et prospérer dans le bain acide qu’est la pyramide hiérarchique. Dans une pyramide, il vaut mieux avoir l’air occupé (action) que l’air pensif (réflexion) – cf. mon billet sur la stupidité fonctionnelle comme mode de management. C’est pourquoi, il me semble fondamental de changer de niveau de logique quand on a besoin de mobiliser l’intelligence collective (cf. le management paradoxal) faute de quoi, on sera réduit à mesurer… ou plutôt observer des situations de stupidité collective. Ces situations résultent de la volonté de faire du “participatif” dans la logique Ordre au lieu de travailler dans la logique Chaos.
Merci à Roberta Faulhaber, grande ambassadrice de l’intelligence collective, pour le lien vers cette étude. J’avais déjà publié un billet au moment de la publication de ce rapport en 2010 mais sans avoir la source avec les bases de l’étude. Voici ce billet avec quelques éléments complémentaires :
http://www.excellence-decisionnelle.com/2010/11/08/evaluer-intelligence-collective-equipe/
Extrêmement intéressant ! Merci !!!