ChatGPT, mon AI.mour ?

Cette image est unique, elle a été générée automatiquement par une IA sur https://labs.openai.com/ avec cette requête : “a heart red in a humanoid digital art”

Les éléments de cet article sont extraits du livre L’excellence décisionnellehttps://amzn.to/2Uc71Sh

Avec le lancement de ChatGPT fin 2022 (https://chat.openai.com), l’IA est entrée dans la vie du grand public. On lui pose des questions et on recherche des contenus comme on le fait avec Google, mais on obtient une réponse similaire à celle d’un humain plutôt qu’une liste de sites sur Internet. Bien plus puissant qu’un moteur de recherche, ChatGPT est conversationnel. On peut lui demander d’affiner ou de préciser ses réponses. On peut « discuter » avec cette IA ! Parfois ChatGPT se trompe, mais elle reconnait ses erreurs. Voici un échange pour le prouver :

https://chat.openai.co

En résumé, si vous affirmez quelque chose de faux, ChatGPT vous fait confiance et va “boucher les trous” en “inventant” une réponse même si votre question est absurde.

Comme d’habitude avec les innovations, certains vous diront que c’était mieux avant. D’autres crieront : « ChatGPT, mon AI.mour ! ». Tout système, quel qu’il soit, provoque des effets positifs et négatifs. L’adoption massive et rapide de ChatGPT indique que les effets positifs sont probablement plus nombreux que les effets négatifs. On peut imaginer que l’adoption sera donc durable. Comme l’explique Christian Terwiesch, professeur américain à l’université de Wharton : « Nous n’allons pas remettre le dentifrice dans le tube. Cette technologie est là. Elle ne fera que grandir. ».

ChatGPT : la terreur des professeurs

ChatGPT a réussi un examen d’entrée dans une école d’ingénieur et, d’après Christian Terwiesch, il obtiendrait sans problème un MBA. Il peut rédiger une dissertation, une chanson ou un poème dans un style particulier. Il peut répondre à des questions, résumer un livre ou écrire une lettre de motivation. Il peut traduire ou améliorer une traduction, trouver des titres pour un article et générer du code pour des programmes informatiques. Si les élèves l’utilisent pour faire leur devoir à leur place, le professeur ne saura plus s’il est en train de noter un élève ou ChatGPT. Il lui reste alors 3 options :

  1. L’interdire… mais comment contrôler ce que les élèves font chez eux. On peut toujours espérer des technologies anti-plagiat spécifiques à ChatGPT. On peut aussi faire le pari que les étudiants sauront être malins en modifiant, reformulant leur texte pour échapper à ces nouveaux systèmes. Les douaniers ont souvent un train de retard sur les trafiquants de drogues qui s’adaptent sans cesse. Interdire est rassurant, mais probablement peu efficace dans la durée.
  2. Stopper toutes les évaluations à distance tant que les logiciels anti-plagiat sont impuissants. On revient au contrôle en classe, en présentiel. Beaucoup de formations sont devenues 100% distancielles, cela va être difficile.
  3. Réinventer les méthodes d’évaluation.

On peut faire le pari que ChatGPT va être l’accélérateur de la réinvention des méthodes d’évaluation tout comme le COVID 19 a été l’accélérateur de la transformation digitale. On évalue trop souvent aujourd’hui des têtes bien pleines alors qu’on devrait évaluer des têtes bien faites. Le principal problème est que cela donnerait beaucoup plus de travail aux professeurs. Fini les QCM ! Depuis des années, on évalue donc en réalité le « bachotage » : ingurgiter des masses de connaissances, régurgiter sur une copie et oublier la majeure partie, voire la totalité dans les jours suivants. Avoir son diplôme démontre au moins une chose : nous avons une bonne mémoire… à court terme. Pourrions-nous être plus ambitieux ? Cela supposerait de mesurer aussi les capacités réflexives d’un étudiant (une réflexion autour du contenu) et pas seulement ses capacités cognitives (le contenu lui-même). Cela dit, nous devrions aller encore plus loin.

À l’heure des compétences comportementales ou « Soft skills », il est peut-être temps d’évaluer aussi notre capacité à coopérer, à co-construire, à co-créer, à écouter, à rechercher la diversité, à distribuer la parole ou à communiquer avec bienveillance. Dans un monde compliqué, linéaire, stable, on peut s’appuyer sur l’expert qui va « régurgiter » ses connaissances comme il le faisait à l’université durant les examens. Dans un monde volatile, incertain, complexe et ambigu, nous avons besoin de développer notre intelligence relationnelle pour mettre en synergie les connaissances et les expériences afin de les hybrider. Nous ne devrions donc pas seulement évaluer le résultat, mais aussi la façon dont le résultat a été obtenu.

Enfin, vous connaissez probablement la classe inversée ou pédagogie inversée. Il s’agit de faire travailler les étudiants en amont du cours avec des lectures. On peut alors consacrer le temps où les étudiants sont présents avec le professeur à d’autres activités : approfondissement de certaines notions, réponse aux questions des étudiants, mais aussi échanges et débats. Cependant, vous ne connaissez peut-être pas la classe renversée dans laquelle le professeur devient l’élève et les étudiants deviennent le professeur. Ils doivent construire l’architecture du cours et son contenu à l’aide de méthodes d’intelligence collective ainsi que les questionnaires d’évaluation. Pour aller plus loin sur ce sujet : https://youtu.be/ni7DeV3iOQk.

Malheureusement, sur le thème de la classe renversée, ChatGPT est parfaitement capable d’écrire le cours et de rédiger le questionnaire d’évaluation. Cela dit, si on doit réinventer les méthodes d’évaluation, profitons-en pour réinventer également la pédagogie qu’elle soit inversée ou renversée. Si cette perspective ne vous plait pas, vous pouvez choisir une voie plus simple et remettre le dentifrice dans le tube en interdisant ChatGPT ou en supprimant les évaluations distancielles.

Les écoles 42, écoles de formation à l’informatique, proposent un modèle pédagogique très proche de la classe renversée, mais qui va beaucoup plus loin puisqu’il n’y a pas de professeur, pas de cours et pas d’examen ! Le modèle repose sur l’apprentissage par les pairs et met en avant l’esprit d’équipe et la collaboration. À la manière d’un jeu vidéo, les élèves doivent gagner des points d’expérience pour accéder à de nouveaux projets dans lesquels la réussite est fondée sur la collaboration avec ses pairs. Cela amène les étudiants à développer leur autonomie, leur débrouillardise, leur esprit de coopération et d’entraide, leur pensée critique et leur créativité. Il n’y a pas de professeurs, mais une équipe pédagogique s’occupe des projets proposés aux étudiants. Selon les domaines ou spécialités, l’école 42 se classe dans le top 5 ou 10 des meilleures écoles. Il est évident que le modèle pédagogique n’est pas réplicable en l’état à tous les domaines de formation (droit, économie, architecture, médecine…), mais il DEVRAIT être une source d’inspiration pour réinventer la pédagogie et l’évaluation. Certaines formations prendront 1% du modèle, d’autres beaucoup plus. ChatGPT est l’occasion de se poser des questions plutôt que de mettre toute son énergie à remettre le dentifrice dans le tube !

De l’intelligence remplacée à l’intelligence augmentée

ChatGPT sera votre pire ennemi si vous l’utilisez pour remplacer votre intelligence. Dans ce cas, vous lui faites réaliser le travail à votre place et, si c’est une évaluation, vous devenez malhonnête puisque vous trichez. Vous découvrirez alors comment une intelligence artificielle vous a aidé à rendre votre intelligence superficielle. ChatGPT sera votre plus grand AI.mour si vous l’utilisez pour augmenter votre intelligence.

Bien entendu, un “prompt” dans ChatGPT ne va pas vous rendre plus intelligent biologiquement ! L’IA va seulement augmenter vos capacités cognitives puis réflexives en vous donnant des éléments plus nombreux et/ou plus synthétiques et/ou plus précis et/ou plus rapidement. Ces éléments (savoirs, savoir-faire, données, informations) vont alimenter votre cerveau en quantité et cela permettra ensuite d’augmenter la qualité de votre réflexion d’où l’idée d’une intelligence augmentée.

Vous prenez le risque d’obtenir moins d’éléments quantitativement en utilisant uniquement l’échange oral avec quelques personnes, uniquement des articles ou des livres où il faut prendre du temps pour trouver ce dont vous avez besoin ou uniquement un moteur de recherche qui vous renvoie sur des centaines de pages à la recherche de l’aiguille dans la meule de foin. Au-delà du temps perdu, votre réflexion s’appuiera sur moins d’éléments ou moins qualitatifs, elle risque donc d’être moins performante en particulier du fait de vos biais cognitifs.

« Si l’intelligence artificielle est capable de m’imiter, c’est que je suis le problème – pas l’ordinateur » Alexandre Astier

Quand une société forme des têtes bien pleines, elle voit votre cerveau comme un disque dur ou un disque SSD pour les plus brillants. On vous pose un problème, vous sortez une solution. Dans quelques années, vous découvrirez à vos dépens que ce modèle d’éducation vous met en compétition directe avec l’IA. Si elle peut le faire mieux que vous, quelle est votre création de valeur sur le marché du travail ?

Quand une société forme des têtes bien faites, la création de valeur n’est plus dans la régurgitation d’une masse de connaissances, mais dans un travail autour de la connaissance. ChatGPT est alors un moyen d’aller plus loin, d’augmenter nos capacités réflexives et non de les réduire comme le fait un système éducatif fondé sur le bachotage. L’IA a rédigé pour vous une première version d’un document. Tout le temps gagné peut maintenant être utilisé pour approfondir, améliorer, questionner, sourcer ou peaufiner. Vous avez une base de travail sur laquelle vous pouvez mobiliser l’intelligence individuelle ou collective.

En effet, ChatGPT sait répondre aux questions, mais il ne sait pas poser des questions. Il sait créer des questionnaires, des listes de questions sur un sujet, mais il a besoin d’être guidé sur un point précis et il ne va pas inventer une question sur-mesure, simplement proposer des questions disponibles dans sa base de données.

Nous traitons parfois des sujets simples où nous n’avons pas besoin de nous poser beaucoup de questions pour trouver une solution. Il suffit probablement de chercher la solution dans un livre. Nous sommes également confrontés à des sujets complexes où la réponse n’est pas évidente : quelle est la bonne stratégie pour notre entreprise ? Faut-il miser sur les énergies renouvelables ou le nucléaire ? Faut-il nous organiser par zone géographique ou par métiers ? Comment intégrer de nouveaux moteurs sur le futur Boeing 737 Max ? Pour cette dernière question, les ingénieurs n’ont pas bien répondu à cette question, on connaît la suite. La réponse n’était pas évidente, des gens sont morts.

Quand nous traitons des sujets complexes, la réponse ne se trouve pas dans un livre. Elle doit émerger dans le cadre d’un processus d’intelligence collective. Face à la complexité, pour atteindre l’excellence décisionnelle, il faut alors se poser les bonnes questions avant de trouver la bonne solution. Les questions permettent de bien poser le problème :

« Un problème sans solution est un problème mal posé. » Albert Einstein

Le talon d’Achille de l’IA réside donc dans son incapacité à se questionner, à douter de ses réponses. Elle peut simplement admettre ses erreurs quand elle invente des œufs de vache ! L’IA sait résoudre un problème (problem solving), mais pas questionner un problème (problem questioning). L’IA ne vous posera pas LA question qui va totalement changer votre vision du problème parce que pour être capable de poser cette “super” question, il faut non seulement avoir une compréhension holistique du contexte, mais aussi être capable de créer des liens et mesurer des interactions entre des éléments disparates.

Par ailleurs, elle est capable de composer, de recomposer, de juxtaposer, de mixer des textes qui se trouvent dans sa base. Mais, dans le cadre d’une prise de décision, elle est incapable d’hybrider des idées : créer une idée qui n’existe pas dans sa base. Hybrider consiste à concevoir une solution qui n’était dans la tête de personne au début de la réflexion. ChatGPT ne peut pas proposer une solution ou une question qui n’existe pas dans sa base de données. Noter que la chose est possible dans un processus artistique de création d’images avec l’aide d’une IA générative fondée sur une variable aléatoire dans l’algorithme – https://openai.com/dall-e-2/. C’est ainsi que j’ai créé l’image au début de l’article !

Savoir questionner et hybrider sont les voies qui nous conduiront à une intelligence augmentée puisque ce sont les 2 talons d’Achille de l’IA. Cela nécessite des têtes bien faites et pas uniquement des têtes bien pleines, car personne n’aura jamais une tête aussi pleine que ChatGPT. On doit bien sûr connaître les bases du questionnement (questions ouvertes, fermées, alternatives), mais nous devons également maîtriser l’approche du Problem questioning que je classe en 3 catégories :

  1. Questionnement récurrent : la méthode des 5 pourquoi, QQOQCCP, guide d’entretien en Design Thinking, Check-list, etc. ChatGPT peut vous aider pour ce type de questionnement. Il faut simplement lui donner une instruction comme : “You must ALWAYS ask questions BEFORE you answer.” Vous aurez en retour une liste de questions récurrentes sur le sujet que vous traitez. Si vous ne conditionnez pas ChatGPT en “questionneur” avec une instruction précise, il vous donnera uniquement des solutions.
  2. Questionnement émergent : co-construction des questions en utilisant la méthode des tours de table de questions ou du Sprint Digital. Une question me donne l’idée d’une question qui va donner l’idée d’une autre question à quelqu’un d’autre, etc. Les tours de questions sont par exemple utilisés dans la technique du co-développement pour bien poser le problème.
  3. Questionnement exploratoire : posture d’humilité et de curiosité pour comprendre la situation d’une personne et l’aider à prendre du recul – cela correspond à la pratique du coaching.

En résumé, ChatGPT va nous aider à :

  • Augmenter notre productivité et en particulier accélérer les productions sans grande valeur ajoutée intellectuelle : solution évidente ou fastidieuse à produire. Si la solution existe dans une base de données, pourquoi la réinventer ? En poussant plus loin, pourquoi apprendre par cœur des connaissances qui sont disponibles en un clic et qu’on oubliera le lendemain de l’examen ?
  • Stimuler le questionnement et la réflexion / hybridation sur les situations complexes ou pour innover. D’une certaine manière, ChatGPT devient symboliquement une personne qu’on invite dans un tour de table pour favoriser l’hybridation ou l’innovation.

Au lieu d’interdire ChatGPT dans les universités, nous devrions donc l’imposer. Il est fondamental de dissocier l’évaluation d’un examen avec le risque de triche et la formation de futurs décideurs dont on aimerait qu’ils aient la tête bien faite. Les étudiants devraient apprendre à augmenter leur intelligence avec différents processus de questionnement et d’hybridation puis seraient évalués sur leur capacité à bien l’utiliser avec des méthodes d’évaluation traditionnelles… ou modernes si on accepte de les réinventer ! L’IA crée un contenu (une base, un point d’appui) qu’il faut ensuite questionner, approfondir et surtout hybrider.

Si nous faisions un peu de prospective, nous pourrions dire qu’un jour, les enfants devront apprendre à lire, à écrire, à compter et à chatgpter. Ce jour viendra plus ou moins vite selon les pays, cela dessinera une nouvelle frontière entre les pays prospères et les autres.

ChatGPT : un premier pas vers une menace existentielle pour l’humanité ?

Contenu extrait d’un article sur mon blog Rêv-olution…

L’inverse de l’ai.mour, c’est la peur. En voyant la puissance de ChatGPT, certains pensent que cette IA est peut-être un grand pas vers une super intelligence artificielle qui pourrait à terme menacer l’existence de l’humanité. Ce n’est pas une fiction, il suffit d’écouter Elon Musk qui réclame un moratoire sur l’intelligence artificielle !

« Une fois que l’intelligence artificielle dépassera de loin l’intelligence humaine, nous pourrions nous retrouver avec aussi peu de pouvoir sur notre avenir que les chimpanzés en ont sur le leur » MacAskill

Dans un article de The Conversation, un groupe de scientifiques conteste vigoureusement le discours des prophètes de l’Apocalypse qui créent, d’après eux, un mouvement de panique absurde : “D’éminents scientifiques et technologues de l’IA pointent les potentiels risques existentiels posés par ces développements – c’est-à-dire les risques qui menacent la survie de l’humanité. Nous travaillons dans le domaine de l’IA depuis des décennies et avons été surpris par cette popularité subite et ce sensationnalisme.”

Ces prophètes de l’Apocalypse affirment même que la crise climatique est beaucoup moins grave le développement de l’IA. Ils pensent qu’il faut investir dans les technologies… mais pour les contrôler !

Derrière le discours pseudo-rationnel de grands experts et de grands esprits sur les menaces existentielles de l’IA, il y a simplement des biais cognitifs que nous aborderons plus en détail à la fin de l’article : biais d’aversion pour le risque (Terminator & Skynet sont en route), biais de négativité (on va tous mourir), biais de statu quo (le vieux conflit des anciens et des modernes), etc. et surtout la PEUR. Quoi de plus naturel pour un humain que la peur ?

L’article de The Conversation distingue 3 types d’IA :
1 – L’IA faible (narrow AI ou weak AI en anglais), qui désigne les systèmes d’IA capables d’effectuer des tâches spécifiques ou de résoudre des problèmes particuliers. Tous les systèmes d’IA actuels sont des systèmes d’IA faible, y compris les chatbots comme ChatGPT. L’article mentionne les 10 problèmes que pose cette IA faible.
2 – L’IA forte, ou IA générale, qui fait référence aux systèmes d’IA qui présentent un niveau d’intelligence similaire à celui des humains, y compris la capacité de comprendre, d’apprendre et d’appliquer des connaissances à un large éventail de tâches et d’incorporer des concepts tels que la conscience. L’IA générale est largement hypothétique et n’a pas été réalisée à ce jour.
3 – Les super intelligences désignent les systèmes d’IA dotés d’une intelligence supérieure à l’intelligence humaine pour toutes les tâches. Par définition, nous sommes incapables de comprendre ce type d’intelligence, de la même manière qu’une fourmi n’est pas en mesure de comprendre notre intelligence. La super IA est un concept encore plus spéculatif que l’IA générale.

Les prophètes de l’Apocalypse pensent donc que l’IA faible, et en particulier ChatGPT, annonce l’arrivée prochaine de la super intelligence et lui attribuent déjà l’intention de détruire l’humanité. La peur, la névrose ou les biais cognitifs peuvent conduire d’éminents scientifiques et technologues de l’IA à des raisonnements absurdes, quel que soit leur quotient intellectuel. L’humanité est le plus grand danger pour l’humanité. Tout comme une bombe nucléaire, l’IA est un outil. Le danger vient de celui qui tient l’outil et non de l’outil lui-même. Le sucre provoque des morts chaque jour et il est donc bien plus dangereux qu’un concept spéculatif de super intelligence.

Cette posture des prophètes de l’Apocalypse s’inscrit dans un mouvement plus global de Grande Régression que je décris dans cet article : Prêt pour la Grande Régression ?

Source : Philosophie Magazine – Hors-série – Été 2023

Comme l’explique Philippe Vallat : “l’émergence est un phénomène qu’on trouve au niveau moléculaire (exemple classique de l’eau H2O dont les qualités ne peuvent pas être déduites des qualités de H et O) et dans les systèmes vivants, mais pas dans le monde de la matière inanimée, le monde des choses non-vivantes. Cela renvoie à la distinction entre le compliqué (le monde des machines) et le complexe (le monde du vivant). Jamais une machine n’aura de conscience, car la matière est une émergence de la conscience, et non pas l’inverse.” Une super intelligence artificielle consciente est donc probablement… improbable, voire impossible !

En résumé :

  1. Les humains ont une conscience, mais la conscience de soi est un chemin long et difficile, voire impossible si on n’a pas envie de prendre ce chemin. Si c’est difficile dans le monde du vivant, cela va être encore plus difficile dans le monde des machines.
  2. On trouve des super intelligences artificielles dans les romans et les films comme Terminator, mais je ne pense pas que nous irons au-delà du divertissement. La PEUR, créée et entretenue par les prophètes de l’Apocalypse, va malheureusement rendre réel ce qui n’est que divertissement et fiction. Il est plus facile d’avoir conscience d’un danger réel ou imaginaire que d’avoir conscience de soi !

Attention aux biais cognitifs !

Un biais cognitif se produit quand notre cerveau simplifie la réalité et finalement la déforme. Les biais cognitifs nuisent à la pensée rationnelle et… à l’intelligence artificielle. Il y a en effet un meta-biais propre à l’IA : si le « big data » est biaisé, la solution le sera aussi. Plus la situation est complexe, plus les impacts humains ou financiers sont importants, plus il faut se méfier des biais cognitifs dans une prise de décision. Cela ne concerne donc pas la reconnaissance d’images par exemple.

Le biais d’ancrage est l’un des plus graves. Si vous regardez une radiographie et que l’IA vous dit que tout va bien, elle vous a ancrée sur « tout va bien ». Votre analyse sera biaisée. Il est donc fondamental de faire sa propre analyse puis de la confronter à celle de l’IA (ou d’un collègue) plutôt que l’inverse. On revient ainsi sur la notion d’intelligence augmentée plutôt que l’intelligence remplacée !

Le biais d’autorité peut conduire à survaloriser la parole de l’IA ou à la sous-valoriser selon que vous êtes fan de l’IA ou que vous pensez que l’IA n’est pas fiable, voire dangereuse. Terminator et Skynet seraient à nos portes ! Ce biais va conduire à une confiance ou une méfiance excessive.

Face au biais de la pensée de groupe, l’IA peut aider à lutter contre le phénomène de pseudo-consensus qui conduit à une uniformisation de la pensée, mais à condition de réfléchir avant de dévoiler les prévisions de l’IA.

Enfin, il ne suffit pas de donner un résultat, il faut aussi expliquer le pourquoi du résultat surtout si les impacts humains et/ou financiers sont forts. Sinon, on active le biais de l’aversion pour le risque. De ce fait, il est inutile d’un point de vue psychologique de créer une IA qui aiderait à prendre des décisions sur des sujets à fort impact humain ou financier si on n’est pas ensuite capable d’expliquer comment le résultat a été obtenu. Pour cette raison, sur les sujets complexes, l’IA ne peut pas être autonome. On doit fonctionner en mode intelligence augmentée même si on est un jour capable de réaliser une IA parfaite. On peut changer l’IA, mais pas la nature humaine.

Enfin, pour prendre d’excellentes décisions, il manque encore à l’IA deux qualités fondamentales : la curiosité et l’humilité. Si un humain en manque aussi, il se met de facto au même niveau qu’une IA surtout si c’est un coach.

L’intelligence artificielle est une aide à la décision et le sera de plus en plus dans les prochaines années. Elle a une capacité prédictive. Utilisée par un petit nombre d’entreprises, son usage en mode aide à la décision va se démocratiser grâce aux technologies comme ChatGPT.

Que vous soyez étudiant, professeur ou décideur, êtes-vous prêts pour le futur ? ChatGPT pourrait être votre plus grand AI.mour ou votre pire cauchemar selon l’usage que vous en ferez : intelligence augmentée ou intelligence remplacée ! Quand la voiture est arrivée dans nos vies sans règle de conduite, cela a provoqué des accidents. Nous avons donc mis en place un code de la route et exigé que les conducteurs passent leur permis de conduire. Sans cadre, sans formation sur les bonnes pratiques, il est probable que vous suivrez les conseils de ChatGPT (cf. copie d’écran au début de l’article) : vous proposerez bientôt à votre manager de vendre des œufs de vache… Pour cette raison, j’ai intégré un module ChatGTP à toutes mes formations sur l’excellence décisionnelle. En effet, il y a une différence importante entre faire une requête dans un moteur de recherche et converser avec une IA car l’utilisateur s’exprime en langage naturel. Il s’agit du concept de prompt engineering ou art du prompt : savoir rédiger la meilleure requête pour aboutir au résultat espéré. L’utilisateur doit rédiger sa requête avec des mots clés spécifiques, un contexte, des exemples de ce qu’il attend pour orienter au mieux le résultat du modèle.

Qu’en pensez-vous ?


Mise à jour : un mois après la publication de cet article, je pose à nouveau la question sur les œufs de vache à ChatGPT pour voir s’il apprend de ses erreurs, voilà le résultat :


Remerciements à Claude Emond et à Robert de Quelen pour nos échanges stimulants sur ce sujet. Merci à Claude pour sa trouvaille « AI.mour » !

Cet article a été rédigé à partir d’extraits du livre L’excellence décisionnellehttps://amzn.to/2Uc71Sh


Je propose une conférence-atelier sur les biais cognitifs. Le sujet est abordé sous l’angle de l’excellence décisionnelle, de l’intelligence collective et de l’intelligence artificielle avec des apports conceptuels, un questionnaire d’auto-diagnostic et des mises en pratique. Contactez-moi si vous souhaitez professionnaliser vos collaborateurs sur ce sujet.


Le débat est ouvert sur LinkedIn : https://www.linkedin.com/posts/olivierzara_chatgpt-mon-aimour-activity-7035377906994278400-mgZT


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Author: Olivier Zara

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6 thoughts on “ChatGPT, mon AI.mour ?”

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