Les éléments de cet article sont extraits du livre L’excellence décisionnelle – https://amzn.to/2Uc71Sh – Manifeste des 20 principes de l’excellence décisionnelle
Dans cet article, je vous propose de découvrir un référentiel de 17 compétences pour devenir un architecte des décisions complexes afin d’atteindre l’excellence décisionnelle lorsqu’on traite un enjeu collectif, un sujet complexe : 8 savoir-être + 9 savoir-faire. Pour comprendre ce référentiel, vous devez savoir que si vous êtes un expert et un manager, vous êtes 4 décideurs en même temps ! Si vous n’êtes pas expert, vous êtes 3 décideurs.
Pour comprendre le fonctionnement de cette pyramide, je vous invite à lire cet article : http://www.excellence-decisionnelle.com/2023/05/27/pyramide-des-4-decideurs/
Dans le cadre de référence de cette pyramide, nous allons uniquement présenter le référentiel de compétences dont un décideur du complexe aura besoin pour traiter un enjeu collectif et devenir un architecte des décisions complexes. Ce référentiel peut également être utilisé pour évaluer vos décideurs lorsqu’ils traitent des enjeux collectifs.
Les 8 savoir-être de l’excellence décisionnelle, présentés ci-dessous, sont globalement difficiles à obtenir naturellement. Ils sont plutôt contre-naturels. Si une personne n’a pas pris librement, sans influence, la décision de changer de comportements, le coaching ou les incantations de la direction seront sans effet. De ce fait, plutôt que de changer le savoir-être d’une personne, il vaut mieux lui imposer des savoir-faire qui changeront ponctuellement son savoir-être, c’est-à-dire le temps d’une réunion ou d’une étape d’un processus. Pour atteindre l’excellence décisionnelle, nous n’avons pas besoin de changer le savoir-être en général ou en permanence. C’est moins ambitieux, mais plus réaliste et tout aussi efficace. Pour aller plus loin sur ce sujet, voir cet article…
17 Compétences | Commentaires | |
8 Savoir-être | Attitudes / Outils | |
1. Savoir être un leader-expert | Avoir une vision sur une évolution / innovation technique ou la faire émerger par co-construction en mobilisant l’intelligence collective (leadership partagé). Savoir identifier l’obsolescence décisionnelle programmée | Par exemple, faire atterrir des fusées, transformer un téléphone en smartphone, mettre en réseau des ordinateurs (Internet), etc. Grâce au savoir-faire sur la gestion de l’obsolescence décisionnelle programmée, on a une vision du présent, des signaux faibles qui nous permet ensuite d’avoir une vision du futur. |
2. Savoir être un leader-manager | Avoir une vision sur une évolution organisationnelle ou opérationnelle ou la faire émerger par co-construction en mobilisant l’intelligence collective (leadership partagé). Savoir gérer l’obsolescence décisionnelle programmée | Transformer en faisant gagner toutes les parties prenantes (cf. RSE) La gestion de l’obsolescence décisionnelle programmée permet d’avoir une vision du futur (cf. savoir-faire 17 ci-dessous) |
3. Humilité | Mobiliser l’intelligence collective est le moyen le plus simple de devenir humble ! Savoir qu’on ne sait pas avec certitude est difficile tout seul dans sa tour d’ivoire entouré de collaborateurs qu’on évalue et qui n’ont pas envie de contrarier le chef en le conscientisant sur l’étendue de son ignorance. Savoir poser des questions avant de chercher des solutions pour bien poser le problème et identifier les angles morts. Faire la différence entre le rôle d’expert et de manager. Comprendre la pyramide des 4 décideurs. | Dans un tour de table de questions (Codev), chacun découvre au fil des tours qu’il ne sait pas tout. Ainsi, on fait émerger une humilité collective. |
4. L’extrême humilité | Douter systématiquement des informations qu’on reçoit, car ce qui est normal, c’est de ne pas se comprendre. Valider les informations reçues de l’émetteur avec une diversité de sources : le fameux Facts Checking ! Questionner les affirmations (de l’émetteur ou des sources) pour les transformer en ce qu’elles sont réellement : des hypothèses. Explorer sans cesse pour trouver les informations qu’on ne reçoit pas, car il y a pire que déformer un message… ne pas le recevoir. Ne pas avoir l’impression d’être humble : c’est celui qui le dit ou qui le pense qui… ne l’est pas. | Quand le sujet est très complexe et à haut risque, on ne peut pas se contenter de l’humilité. Il faut passer à l’extrême humilité ! L’inverse consiste à : 1. Ne pas se poser trop de questions et surtout pas 25 à 50 questions. 2. Ne douter de rien et surtout pas de sa force et de son intelligence. 3. Se croire intelligent, surtout si c’est vrai, est la première cause d’une décision absurde. 4. Ne pas se casser la tête à chercher plus d’informations quand on en a déjà plein. |
5. Écoute active / Empathie collective | Savoir se taire alors qu’on voudrait parler. Écouter pour comprendre et non pour répondre. Se mettre à la place de l’autre grâce à l’écoute active pour percevoir le monde de mon interlocuteur : le responsable RH se met à la place du responsable financier qui se met à la place du responsable commercial qui se met… | Très difficile à atteindre si on doit attendre trop longtemps pour exprimer ses propres idées. Cela explique l’impopularité de la technique du tour de table qui est frustrante, laborieuse. J’ai inventé une technique de tour de table à l’écrit qui corrige ce problème : le Sprint Digital. Avant de me centrer sur les idées des autres pour les écouter activement, je dois pouvoir exprimer rapidement mes idées. |
6. Bienveillance (veiller au bien) | Technique du feed-forward pour garantir la sécurité psychologique (critiquer, objecter = climat de peur + risque d’humiliation, risque d’auto-censure, de politiquement correct, de pseudo-consensus). Technique du Sprint Bienveillance pour reconnaître les talents mis en œuvre dans une réflexion collective. | Si vous tuez la sécurité psychologique, vous tuez l’excellence décisionnelle. La technique du feed-forward permet d’exprimer un désaccord sans critiquer ou objecter. Notez que la décision par consentement issue de la sociocratie et fondée sur des objections (objectare = s’opposer) est un micro-poison pour la sécurité psychologique dans une organisation hiérarchique. |
7. Altruisme / Entraide | Le donneur ou altruiste (giver) est disposé à rendre service sans rien attendre en retour. | Le preneur ou profiteur (taker) fait passer ses intérêts avant ceux des autres. Il est prêt à tout pour obtenir le plus possible des autres. L’échangeur (matcher) donne si on lui donne : « Si tu ne me donnes rien, je ne te donne rien ». C’est du donnant-donnant ou retour d’ascenseur. |
8. Courage | Plus on utilise un grand nombre d’outils pour atteindre l’excellence décisionnelle, plus on est courageux ! Le savoir-être « courage » émerge plus facilement avec les bons savoir-faire. Décider seul ou collégialement (cas où il y a des investissements financiers importants par exemple). Sur un sujet où la subsidiarité ne permet pas d’identifier clairement un responsable : savoir clarifier la subsidiarité plutôt que de se réfugier dans la décision collective. | La peur de se tromper conduit à la co-décision ou décision collective qui permet de dissoudre sa responsabilité dans la soupe collective. Quand tout le monde est responsable, plus personne n’est responsable. Si vous croyez au concept de responsabilité collective, pouvez-vous donner le nom d’une entreprise où il y a eu une punition collective ? La peur de se tromper sur un sujet complexe est légitime puisqu’on saura seulement dans 6 à 12 mois si on a pris la bonne décision. Pour faire disparaître cette peur, il faut que les décideurs du complexe aient une obligation de moyens et non de résultat (explications à la fin de cet article). |
9 Savoir-faire | Outils / Savoirs | |
9. Savoir analyser une situation : simple, compliquée ou complexe ? | Grille d’analyse holistique et systémique sur 24 dimensions. Typologie des 4 pages blanches (sujets impactants par essence de multiples parties prenantes). | Trois situations qui nécessitent 3 processus décisionnels. |
10. Savoir co-construire en hybridant les idées pour faire émerger une intuition collective | Tour de table, Sprint Digital, Codev Opérationnel ou Stratégique. Questionnaires préparatoires pour le décideur et les participants (12 questions, 24 dimensions). | Hybrider est bien différent de juxtaposer comme on juxtapose des Post-its. L’hybridation permet de trouver un point d’équilibre entre les contraintes de chaque partie prenante. L’objectif ne sera jamais atteint avec un mur de Post-its. |
11. Savoir identifier les parties prenantes qui vont exécuter ou qui seront impactées par la future décision | Grille d’analyse holistique. | Cela suppose de faire la différence entre ceux qui sont sur le terrain, ceux qui voient le terrain et ceux qui vivent le terrain. |
12. Savoir gérer les biais cognitifs | Le chef parle toujours en dernier. Sondage d’ouverture d’un Codev Stratégique sur l’impact potentiel de 11 biais cognitifs sur le sujet qui va être traité. | Parmi les 188 biais cognitifs, limiter l’impact du biais d’autorité et du biais de la pensée de groupe en particulier. |
13. Savoir créer de la valeur pour toutes les parties prenantes | Matrice d’analyse de la création de valeur à 360°. | Est-ce que la future décision crée ou détruit de la valeur pour l’entreprise, les clients finaux, les managers / collaborateurs et les autres parties prenantes ? Si la décision détruit de la valeur pour une ou plusieurs parties prenantes, l’obsolescence décisionnelle sera accélérée. |
14. Savoir gérer les risques décisionnels sur les sujets complexes | Processus en 6 étapes : identifier l’obsolescence, analyser, combiner, sécuriser, décider et agir. | |
15. Savoir faire réfléchir collectivement avec la plus haute qualité conversationnelle | Combiner au même moment dans une réflexion collective : une diversité de profils représentant les parties prenantes les plus impactées ; une parole distribuée et une écoute active ; une posture de bienveillance ; le chef parle toujours en dernier ; la priorité sur l’hybridation. | |
16. Savoir gérer l’obsolescence décisionnelle programmée | Boite à réflexions pour le suivi individuel des sujets complexes. Sondages sur les enjeux collectifs au moins une fois par an à l’écrit et anonymement pour capter les signaux faibles et se mettre en capacité de faire émerger par co-construction une vision de l’avenir (savoir-être de leader). | Par leur nature, les décisions sur les sujets complexes deviennent tôt ou tard obsolètes. Pour éviter la crise, il faut mesurer régulièrement le niveau d’obsolescence. |
17. Savoir concevoir l’exécution d’une décision avant de décider | Connaître l’iceberg de l’ignorance. Analyse des 4 variables décisionnelles à partir du projet de décision qui a émergé durant le Codev Stratégique. Sprint Digital & Codev Opérationnel pour co-construire les modalités de l’exécution. Sondages sur les 4 variables décisionnelles. | Sur un enjeu collectif, pour que le rêve dans la conception d’une décision ne devienne pas un cauchemar dans l’exécution, il faut également co-construire l’exécution AVANT de décider ! Même une décision co-construite dans un Codev Stratégique peut tourner au cauchemar. Une décision géniale qui n’est pas facile à mettre en œuvre, à faire vivre et qui produit des résultats dans plusieurs années n’est peut-être pas aussi géniale que cela ! |
Si vous souhaitez vous professionnaliser sur ce référentiel de compétences et devenir un architecte des décisions complexes, je propose une formation sur 15 outils.
Ce référentiel peut être également utilisé pour une évaluation de la performance des décideurs du complexe. Comme personne ne sait avec certitude ce qu’il faut faire et qu’on devra attendre 6 à 12 mois avant de savoir si la décision est bonne ou mauvaise, un décideur du complexe ne devrait pas avoir une obligation de résultat, mais une obligation de moyens.
Évaluer un décideur du complexe sur ses résultats consiste à nier la nature même de la complexité. Malheureusement, c’est la norme dans la plupart des entreprises. Au bout de quelques mois, on pourrait juger la décision bonne le lundi, puis mauvaise le vendredi puis de nouveau bonne le lundi suivant. J’exagère un peu sur cet exemple dans une optique pédagogique !
Plus vous mettez en œuvre un grand nombre des compétences de ce référentiel, plus vous êtes un bon décideur du complexe, un bon architecte des décisions complexes, quel que soit le résultat obtenu un an plus tard. Pour aller plus loin sur le thème de l’évaluation des décideurs du complexe, je vous invite à lire mon article : http://www.excellence-decisionnelle.com/2022/02/02/decision-performance/ – Spoiler : la performance ne peut pas se mesurer de la même manière sur le simple, le compliqué et le complexe ; tout comme il y a 3 processus décisionnels, on doit avoir 3 processus d’évaluation.
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